Traverser la Patagonie au rythme de la nature 

«Le voyage est une espèce de porte par où l’on sort de la réalité comme pour pénétrer dans une réalité inexplorée qui semble un rêve.»
(Guy de Maupassant)

Route mythique de la Patagonie, la Carretera Austral se glisse entre les fjords patagons et les Andes. Sur plus de 1200 Km elle emporte le voyageur dans un rêve ambulant. Puis, à Villa O’Higgins, elle disparaît dans l’infini des fjords. Orphelin de cette route mythique, le rêveur poursuit son chemin sur l’eau.

Pour parcourir cette route qui oscille entre terre et mer, goudron et gravillons, mieux vaut charger son sac à dos de patience, sourires et fruits secs pour les petits creux.

Si les unités de mesure restent les même ici et là, le temps, quant à lui,  prend d’autres teintes, s’allonge et divague au gré des aventures. Touriste ou voyageur, chacun aura sa propre expérience patagone du temps. Au bout du monde, 400 km se transforment en 6 heures de bus et 200 km en 8 heures de stop. Qu’importe !, tous les Patagons vous le diront : celui qui vient en Patagonie à toute allure, perd son temps car ici, c’est la nature qui rythme les moteurs et sublime les rencontres.

D’ailleurs il n’y a pas que la nature qui impose ses soupirs : l’embarcadère de Caleta la Arena ferme dès que les vents déchaînent les vagues ; pour quitter Futaleufú vers le sud, un seul bus par semaine ; pour rejoindre Río Tranquilo depuis Coyhaique, les départs ne se font que le matin (bien avant que celui de Futaleufú n’arrive à bon port, bien entendu !) et tout ça rien qu’en été. Pour pimenter le tout nous pourrions aussi parler de la neige, du verglas ou des éboulements hivernaux.

Alors un conseil pour vos préparatifs : évitez de trop anticiper vos réservations de logement ou d’excursions. La Carretera Austral a peut-être d’autres plans pour votre voyage !

Les transports en commun étant rares et/ou très chers sur cette route aux odeurs de bout du monde, l’une des solutions privilégiée par les baroudeurs reste le stop.
Le pouce en l’air, la montre en pause, le vent allonge les secondes et le chant des oiseaux accompagne la solitude du voyageur.
Si les heures d’attente semblent parfois éternelles, elles se font oublier dès le premier coup de frein. A l’arrière d’un 4×4 les kilomètres défilent sans fin, le luxe devient venteux, le sourire se fige dans la fraîcheur d’Éole.
Au détour d’une conversation, entre un pneu crevé ou une pluie torrentielle, surgit peut-être un maté à partager, un arrêt pour observer des paysages inconnus ou encore des recommandations capables de chambouler tout un itinéraire.

Comme une ode à la lenteur, la Carretera Austral s’offre en pause obligatoire du Nord au Sud de la Patagonie.

Sans crier gare, la route 40 prend fin à plusieurs centaines de kilomètres de Puerto Williams, la ville la plus australe au monde. Pour continuer sur le chemin de ce rêve éveillé il faudra choisir entre deux tentations, deux Patagonie, deux pays : 42 heures de bateau dans les fjords reliant Caleta Tortel à Puerto Natales côté chilien ou traverser la frontière et zigzaguer sur les longues lignes droites argentines.

De retour en territoire chilien la route change de nom mais les paysages ne cessent de s’enliser dans les rêves vécus les yeux grand ouverts.
Le vent de Magellan chargé d’odeurs antarctiques nous pousse à aller toujours plus loin, toujours plus au Sud.

Pour atteindre le bout du monde un autre choix est à faire : continuer dans la lenteur apprise au cours des étapes précédentes et se laisser porter sur les eaux du Canal de Beagle, entre glaciers et nuages somptueux ou s’envoler et sourire une dernière fois à ces montagnes qui jamais ne cesseront de nous indiquer que le nord peut-être un sud rêvé, voyagé, vécu au ralenti.


Bout du monde, la Patagonie n’hésite pas à inviter d’un sourire et d’un rayon de soleil le voyageur à prendre le temps de regarder plus loin que le billet retour et commencer à rêver d’une suite à cette langueur du temps jamais perdu.

Sur la plage d'Hornopiren, Carretera Austral, Chili

Cet article participe à l’événement interblogueurs «Au coeur de la Patagonie» organisé par Mathieu Guillouzo du blog Chili Voyages.
Mathieu a orchestré un recueil collaboratif pour parler, lire et rêver de Patagonie. Le recueil est disponible gratuitement ici : Au coeur de la Patagonie.

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