Je t’aime mais je pars : lettre à ceux qui restent

« Partir, c’est mourir un peu. Poursuivre le voyage, c’est peut-être ressusciter. Le vrai voyageur, c’est celui qui jamais ne tente de revenir en arrière. »
(Jacques Renaud)

Je t’aime mais je pars.

Ce n’est pas la première fois que je te promets de rester, de travailler, de ranger mon sac à dos jusqu’aux prochaines vacances. Ce n’est pas la première fois que je rentre en te disant que les au revoir, on les laissera pour les films à l’eau de rose. C’est n’est pas la première fois que mes promesses sont sincères. Vaines. Pourtant je pars. Encore une fois.

Tu sais, j’ai essayé de tenir mes promesses. J’ai fait des études, j’ai cherché un travail, j’ai payé mon loyer et j’ai eu mon café préféré au coin de la rue. J’ai créé une routine de soirées, de rencontres et d’inconnus pour ne pas laisser le temps à ma curiosité de s’ennuyer. J’ai même annulé l’option internationale de ma carte bleue et payé mon adhésion à la médiathèque. Pourtant je t’ai menti. Encore une fois.

Encore une fois je me suis menti à moi-même en te disant que ton amour me ferait rester, en envoyant mon CV pour des CDI, en te disant que j’habiterais bien à Nantes, à Lille, en Bretagne ou n’importe où ailleurs qu’à Guéret. Encore une fois je nous ai trompé sans le vouloir. Encore une fois j’ai plongé dans un Atlas, le passeport ouvert sur de nouveaux tampons.

Je t’aime mais lui, je l’ai dans le sang. J’ai besoin de lui. J’ai besoin de me perdre pour aller acheter une banane. J’ai besoin de dormir chez des inconnus, de goûter les liqueurs de fourmis de l’Amazonie, de chanter au soleil couchant, de danser dans la sueur d’un lendemain oublié. J’ai besoin de sentir la terre rouge dans mes cheveux, d’écouter l’orage dans la rivière, de vivre ici et là des aventures que je voudrais taire. J’ai besoin de la peur de l’avion, de l’insomnie du départ, des rencontres éphémères et des amours impossibles. J’ai besoin de lui. Je ne sais vivre sans lui.

Oui, je sais, c’est une drogue. Ma drogue. Oh non, ce n’est pas une de ces drogues douces qu’on laisse fondre sur la langue en buvant un verre de lait, qui se déguise en chocolatine quand tu l’enrobes de pain. Non, ma drogue à moi n’est pas chocolatée, ça serait trop facile.
Ma drogue elle fait rêver. Elle est exotique, bleue turquoise, blanc glacier. Elle a l’odeur du kérosène et le goût de l’inconnu. A chaque réveil elle me réserve les surprises de l’imprévu. Elle soudoie ma curiosité en lui offrant de l’inespéré. Elle est là. Elle m’attend. En un clic, un pouce en l’air, un compostage je la prends et m’envole vers de nouveaux horizons.

Ma drogue, c'est le voyage.
La pire de toutes ? La meilleure sans doute.

C’est le voyage qui m’arrache à la sédentarité. C’est à cause de lui si aujourd’hui encore je t’aime mais je pars.
Je ne sais pas si tu pourras me comprendre. Un jour peut-être. Jamais sûrement.
Je t’entends murmurer tout bas qu’un voyage ça se décide, ça se prépare. J’entends tes yeux verts glisser au creux de mon cœur des mots sédentaires, des mots sur le long terme. J’entends ta perplexité m’expliquer qu’un voyage ça se choisit, ça ne se subit pas. Tu as peut-être raison, une fois de plus. Peut-être que je me fais croire que le voyage est une drogue pour ne pas m’avouer qu’aucun amour n’est assez fort pour m’enraciner, pour ne pas comprendre que je suis incapable de t’aimer comme je l’aime. Peut-être que j’offre aux drogués l’excuse de ne pas être égoïste mais malade d’un amour immatériel, vécu, sensationnel. En m’affirmant accro aux voyages j’abandonne la responsabilité du choix, de la décision, de l’envie de rester pour te voir sourire, le voir grandir, l’aimer en retour. Peut-être. Peut-être pas.

Malgré tes soupirs et tes silences, chaque note versée sur la routine de la stabilité implose mon être. A chaque battement de cils, je pense à cet inconnu à qui je n’ai pas encore offert de sourire, à ces montagnes à escalader, à ce pain brioché qui se mange là-bas, à cette danse que l’on chante ici. A chaque mot écrit je compte les centimes qui me séparent du prochain voyage, du prochain retard de train, de la prochaine peur que je sentirai en montant dans un bus bolivien. A chacune de tes larmes je pense à tout ce que je ne vivrai pas si je reste à tes côtés. A tout ce que je ne vivrai pas si je pars encore une fois.

Je t’aime mais je pars. Je pars sans avoir vu ton enfant à naître. Je pars sans pouvoir revenir pour ton mariage. Je pars en laissant devant moi tous ces souvenirs qu’on ne partagera pas.
Je le sais, tu m’aimes mais ce n’est pas moi que tu appelleras quand tes parents divorceront. Tu ne me proposeras pas de prendre un thé pour oublier l’hiver éternel. Tu n’attendras pas ma petite cuillère pour ramasser les miettes de ton cœur qu’un abruti aura encore fait valser. Tu n’iras pas manifester pour plus d’équité avec mes rêves d’un monde meilleur.
Tu m’aimes. C’est d’ailleurs pour ça que tu me laisses partir. Encore une fois. Sans un reproche, sans promesse de retrouvailles tu me laisses vivre ma drogue.

Aujourd’hui, je ne sais si te demander pardon ou te dire merci. Pardon pour le départ. Merci pour les au-revoir.

La prochaine fois que je te verrai tu auras grandi. Tu auras aimé, dansé, bu, ri et peut-être même un peu grossi. La prochaine fois que je te verrai j’aurais grossi, ri, bu, dansé et peut-être même un peu aimé. Au loin tu entendras le nom de ces amours plus ou moins éphémères. Perdus dans des sonorités étrangères, tu leur inventeras un visage. Eux connaîtront notre histoire, nos joies, nos peines, nos aventures et notre amour plus grand que toutes ces distances que je sème derrière moi.

Au loin je parle de toi à qui veut m’entendre. Je parle de toi, mon amie, mon frère, ma mère. Je parle de toi la voyageuse que je n’ai plus revue depuis Budapest. Je parle de toi mon frère de cœur, le musicien qui rythme mes mots, l’amoureux que j’ai quitté. Je parle de toi que j’aime d’amours aussi différents que nos relations. Je parle de vous, de ceux qui restent.
Je parle de tes parents qui ont divorcés sans que je puisse te consoler. Je parle de ton bébé à naître, de ces abrutis qui font valser les cœurs en miettes, de ces manifestations auxquelles j’aurais dû offrir ma voix d’équité rêvée.
Au loin, tu es là, tout près. Au fond de mon cœur je te love près des racines qui m’empêchent de perdre le Nord. Parce que oui, je t’aime. Je t’aime mais je pars. Encore une fois.

Je pars et c’est parce que je t’aime que toujours je reviendrai, ne serait-ce que le temps d’un thé sous un soleil éternel.

55 réflexions sur “Je t’aime mais je pars : lettre à ceux qui restent”

  1. “J’ai besoin de me perdre pour aller acheter une banane.”
    Cette petite phrase toute simple, presque anodine ou amusante, résume bien ce qui se passe dans la tête et dans le cœur de ceux qui ont la bougeotte, je suis sûre qu’elle évoquera beaucoup d’images aux globe-trotteurs.
    C’est un haïku de voyageur 🙂

    1. « j’ai besoin de me perdre pour aller acheter une banane.” Ce n’est pas du tout un Haïku !
      Un Haïku c’est 17 syllabes en 3 vers, et doit évoquer la nature, absolument la nature. Donc pas de sujet anthropomorphique, pas de « je »… Voilà, désolé de pourrir l’ambiance mais un peu de rigueur svp !

  2. Une lettre magnifique qui résume l’âme d’un globe trotter mais qui serre le coeur de tous ceux qui restent tout en ayant l’espoir de le revoir un jour sous n’importe quel soleil avec le plus beau des sourires et le coeur rempli de toutes ces rencontres qui enrichissent une âme ….

    1. Merci beaucoup pour ton commentaire Maria.
      Je n’ai jamais vraiment été de ceux qui restent m’ai j’imagine un mélange de sentiments, à al fois triste et heureux, lorsqu’ils restent derrière les portiques de sécurité à l’aéroport.
      En tous cas je trouve ça magnifique d’être aimé au point d’avoir toujours quelqu’un chez qui revenir après un voyage plus ou moins long.
      Merci à ceux qui restent d’accepter la passion du voyage des baroudeurs <3

  3. J’ai adoré ton texte, il est magnifique, parfait, tellement vrai et bien écrit.
    J’ai ressenti chaque émotion, et compris chacune d’elles. C’est tellement ça, cet amour du voyage, cette envie, ce besoin irrépressible et incontrôlable, plus fort que nous, plus fort que tout.

  4. La beauté des mots qui voyagent au fil de ces lignes complaisent la raison de mon nomadisme.
    Je ne pars pas je vous rejoins juste ailleurs vous tous mes amis d’un jour, d’une nuit ou de quelques jours et pourtant de toujours, vous toutes mes familles qui m’ont ouvert leur coeur et fait des votre malgré ces mots que nous ne parlons pas et qui me rappelle à nous.
    Je ne pars pas je reste dans la maison Terre et tout au long du couloir je jette un oeil dans chacune de tes pièces revenant de temps en temps devant l’âtre du salon pour me réchauffer un peu plus que le corps.
    Merci Celine et au plaisir de te recroiser quand tu seras aux Amériques, en Afrique ou aux Inde et moi en Asie, au Magreb ou en mer, qu’importe les lieux, les mots font voyager les sédentaires et se rencontrer les Gitans de la Terre.

    1. Merci Cédrick pour ton joli commentaire.
      Les voyages sont faits d’imprévus, et c’est d’ailleurs ça qui les rend beaux. Alors oui, peut-être qu’un jour nos chemins se croiseront ici ou là. En attendant je te souhaite bonne route !

  5. Pas un mot de plus, tout est dit, merci celine d avoir partager ce magnifique texte qui pour plusieurs baroudeurs n’ont jamais plus expliquer ce ressenti.
    Magique

    1. Merci Jenny pour ce gentil commentaire.
      En 15 ans de voyages c’est la première fois que j’arrive à m’exprimer sur ce sujet. Je comprends donc très bien qu’il soit parfois difficile de poser des mots sur un ressenti, un sentiment.

  6. J’ai bien aimé ton article dans l’ensemble, même si je ne pense pas personnellement en être arrivé à ce stade avec cette drogue mais je partage certaines idées. D’ailleurs cela m’a fait pensé à cet article qu’avaient partagé les filles sur le groupe des WAB : https://l.facebook.com/l.php?u=https%3A%2F%2Fwww.sain-et-naturel.com%2Frelations-modernes-brisent-facilement.html&h=AT1BNLGB70gv8qsQPqrDBhAXmKlo_Z2sbdJx7El4D3ptiHEcvnlTyYsYiRsErmjj3SUAv3kD1unMw8C2ZmIxDaFuf9wLVbO8w3c-He9N_-p0SPnjsKwdjngthHr3Cc55Zw

    Ai-je raison de retrouvé un sens, une idée avec cet article? 🙂

    Au plaisir de te lire,

    1. Merci beaucoup pour cette piste de réflexion.

      Dans mon texte je ne parle pas seulement de relation amoureuse. Je parle des amis, des parents, des frères et soeurs qui restent. Je parle de l’amour en général. Mais plusieurs personnes l’ont compris comme une lettre à un amoureux ou une amoureuse que l’on quitte.

      Je ne me suis pas du tout reconnu dans le lien. Je ne reconnaît d’ailleurs personne de mon entourage. Moi, je fais partie des coeurs d’artichaut qui traversent l’Atlantique par amour et qui essaient de se sédentariser par amour. Renoncer à tout un mode de vie par amour est très difficile (je voyage en solo depuis mes 15 ans). Malgré tous les efforts, tous les sentiments ressentis, parfois ce sacrifice est trop dur à tenir sur le long terme. J’aime penser qu’il s’agit plus d’une question de personnalité que de génération. Pour me rassurer, presque tous mes amis sont des couples mixtes éparpillés aux 4 coins du monde 🙂

      1. J’ai compris cela à la fin de ton texte lorsque tu précis cet amour à tous (famille , amis etc). Ton texte est très beau, un peu trop poétique pour moi dans la tournure mais cela est subjectif, on aime ou on aime pas. Quel courage, et quelle folie, quand je lis ton article “Marions-moi”. En tout cas, cela est toujours très intéressant de lire le ressenti des personnes comme toi qui ont cette volonté et cette vie. Je pense que l’environnement de la société a ses influences quant à notre génération et nos personnalités . J’ai tendance à mélanger dans ma tête, rêve idéalisé et désirs réels. Ce n’est pas facile mais les expériences de voyages aident à déterminer et à affiner ce que nous voulons vraiment je crois. Peut-être même que nous ne savons jamais vraiment ce que nous voulons réellement.

        1. Mon mariage a été une véritable folie ! On a bien rigolé, j’ai pu avoir des papiers en règle et je suis toujours amie avec mon coloc.

          Je suis d’accord avec toi quand tu dis que les voyages aident à affiner nos désirs. Ils aident aussi énormément à définir ce qu’on ne veut pas et quels chemins on ne veut pas suivre.

          Merci encore pour ce commentaire enrichissant.

  7. Magali Laguillaumie

    Une magnifique lettre d’amour, pas seulement du voyage mais de tout et de tous. Une plume délicate, sensible, tendre, magnifique. Merci 🙂

  8. Ce texte est tout simolement sublime et criant de vérité. Je partage totalement ce tiraillement de l’expatrié car je suis tombé amoureuse du voyage et surtout d’un autre continent que le mien. Très be1u style d’ecriture, bravo et merci du partage!

  9. Bonjour ! je dirais wow ! C’est un magnifique texte, j’ai adoré le lire, ça m’a ému. Je suis peut-être un peu trop sensible hihi. J’ai très hâte d’en lire plus. À bientôt.

  10. wahou… Je me suis énormément reconnue dans tes mots… qui m’ont rappelés que je devais prendre le RDV afin de faire mon passeport pour ne plus être limitée aux destinations valables avec une seule carte d’identitée 😉 !!

    MERCI !

  11. Tout est dit. Tes mots sont si justes, j’imagine que beaucoup de voyageurs se reconnaissent dans ce texte !
    J’ai comme envie de le partager à tous les amis que j’ai laissé en France, à mes parents qui se demandent encore quand est-ce que je vais bien rentrer…
    Bref, magnifique ! Ça résume parfaitement pourquoi nous faisons ce choix de partir (nous-voyageurs).
    Merci !

  12. Merci de mettre des mots sur des sentiments si difficiles à exprimer! Je me sens parfois si égoïste d’avoir quitter mes proches depuis tant d’années !
    Je te souhaite beaucoup de bonheur au travers de tes aventures!

    Signé : Une âme perdue au milieu d’un monde qu’il ne comprend pas

  13. Joli texte, comme d’habitude. Ça me fait penser à un mix entre deux articles que j’ai écrits il y a bientôt 3 ans, l’un sur la drogue que représente le voyage pour moi, et l’autre qui relate de l’envers du décor de l’expatriation / voyage au long cours. On partage beaucoup d’idées 🙂
    Je te laisse les consulter ici : https://myglobestory.com/2016/01/13/une-drogue-dure-appelee-voyage/ et là : https://myglobestory.com/2016/03/16/les-coulisses-de-la-distance/

  14. C’est beau, c’est follement beau, c’est tristement vrai et joyeusement animant.
    Ça me transcende et me met face à mes doutes, à mes tentatives d’essayer d’être là. De rester.
    De créer un équilibre ici, puis là, ou encore là bas.
    Je n’y renonce pas, mais je sens que bientôt, je te rejoindrai (au sens métaphorique ;))
    Merci pour ces mots.

    1. Merci beaucoup pour ton commentaire.
      Si tu as envie de me rejoindre, au sens premier, pas de soucis : je suis en train de traverser la Slovénie à pied et je n’ai rien contre le fait de partager un bout de route avec des voyageurs 😀

  15. Amei de verdade. Gostava de escrever assim. Cada palavra tem o seu significado. E todas elas mostram a tua principal paixão. Sem amarras precisas da tua liberdade para expressares o teu mundo que talvez seja o de muitos mas por falta de coragem não arriscam……Sê feliz.

  16. Voila que je débarque sur ce blog. Je clique au hasard. Je vois ce titre d’article qui fait échos à ce que tout vrai voyageur a vécu. Voyageur de la vie, voyageur de la terre. Voyageur tout de même. Je commence donc à lire, curieuse. Et là, je suis sans voix. Selon le paragraphe, je pense à quelqu’un d’autre. Selon le paragraphe je pense à mon père, à ma mère, à mon frère, à ma meilleure amie. Selon le paragraphe, je le vis avec mon coeur, je le ressens dans ma respiration, dans ma gorge, dans mes yeux. Cette lettre est un poème. Une véritable déclaration d’amour tout en étant une affirmation de soi. Voyager est une drogue, certes, mais elle est, par bien des aspects, aussi une preuve d’amour. Merci pour ce moment suspendu! Après tout, bientôt, je le redirai. Je t’aime mais je pars.

  17. Je fais partie de ceux qui restent, et j’aurais aimé que ma meilleure amie, celle qui part, m’ait écrit cette lettre. J’avais accepté ses échappées belles, j’écoutais ses recits, et puis du jour au lendemain, elle a coupé les ponts avec moi, moi qui restait sagement à attendre ses retours. Ça faisait peut être trop mal de revenir et repartir, je ne sais pas, ne le saurai jamais. Cela fait 5 ans, je ne sais où elle est aujourd’hui.. 5 ans de silence.

    J’ai aujourd’hui du mal avec ceux qui partent vous devez bien vous en douter. Voilà pourquoi cette lettre me semble surtout une belle lettre de déculpabilisation… mais c’est la douleur toujours présente malgré tout ce temps qui me fait penser ainsi, j’en ai conscience .

    1. Je suis désolée de lire ça. Je suis désolée que votre amie soit partie en mettant fin à votre amitié, en silence. J’imagine que la douleur a été grande. J’espère que vous avez trouvé toutes les deux votre voie et êtes épanouies.

      Je voyage en solo depuis mes 15 ans et il m’aura fallu quasiment 15 ans pour trouver les mots et écrire cette lettre. Avant d’exprimer mes sentiments à mes amis perdus, à ma famille et aux cœurs brisés j’ai du comprendre que le voyage était mon mode de vie ; qu’être « semi-nomade » était ni mieux ni pire qu’être sédentaire, que c’était simplement un chemin de vie différent. J’ai ensuite du accepter que je n’avais pas à me sentir coupable de ce choix, tout comme une personne sédentaire n’a pas à se sentir coupable de vivre au même endroit toute sa vie.

      Si vous retrouvez votre amie ou si elle vous retrouve j’espère que vous trouverez les mots pour lui exprimer ce que vous ressentez. Courage et merci pour ce commentaire !

  18. Je reste bouche bée en lisant ce texte si beau, si vrai…
    Chaque mot, chaque ressenti résonne dans ma tête car cet amour pour les voyages est parfois difficile à expliquer et à comprendre pour nos proches.
    La plupart des gens pensent que vouloir voyager est signe de fuite de la réalité du quotidien.
    Je me dis qu’il se peut qu’inconsciemment il y ait un peu de vrai mais je pense surtout qu’il s’agit de soif de découverte du monde.
    J’aime ton texte car il me parle, me semble si vrai…
    Il m’a beaucoup émue alors merci 😊
    Bonne route pour les prochaines aventures !

  19. Bonsoir,
    Superbe texte.
    Je suis également voyageuse dans l’âme, je n’ai pas autant voyagé que je le voudrais car justement je n’arrive pas à laisser ceux qui reste.
    Je suis prise d’angoisse que quelques chose se passe pendant mon absence.
    À présent, j’ai une opportunité en or pour partir m’installer en Espagne, un emploi dans mon domaine m’attends. Je dois partir dans une semaine mais mon cœur se sert quand j’y pense. Dur de laisser ma mère, dur de laisser l’homme que je fréquente, dur de se dire qu’il va falloir reconstruire un cercle d’amis… La découverte, l’envie de l’évasion surtout en ces temps difficile, m’appelle et à la fois je ne me suis jamais autant sentie à ma place qu’ici, près de ma famille.
    Est-ce la culpabilité qui parle ? Je ne sais pas, ou simplement la peur de se retrouver seule ? J’ai déjà voyagé seule et vécue de longs mois à l’étranger, cependant est-ce ce contexte actuel incertain qui me freine ? Je ne sais pas.
    Votre texte est en tout cas une bouffée d’air frais et procure un apaisement, on se sent soudain moins seule.

    Merci et belle soirée 🌺

    1. Je comprends que ce genre de décision soit difficile à prendre. Difficile de se séparer, de partir, de se reconstruit un cocon dans un endroit inconnu. Comme tu le dis, le contexte actuel ajoute une dose d’incertitude. J’espère que tu réussiras à prendre la décision qui te convient le mieux, que ce soit rester ou partir.

      Souvent, je me dis qu’aucune décision de ce type n’est irrévocable. Je m’accorde le droit à l’erreur, au test. Je me dis que si je n’y arrive pas, si ça ne me convient pas, si je n’étais pas prête ou autre, j’ai toujours la possibilité de rentrer. Ce n’est pas un échec. C’est juste que ce n’était pas le bon moment.

      Courage 🤍

  20. Bonjour Céline,

    Je trouve ton poème très beau et il m’a énormément touché. Il a une résonance toute particulière car je suis en train de traverser en ce moment, un moment délicat avec mon amoureuse.

    Nous avons 28 ans et nous sommes ensemble depuis 6 ans. Tous deux étant professeurs des écoles. Elle a pris une année de dispo pour voyager. De nature indépendante et autonome, je savais que cette année étaient une chance pour elle et une source d’épanouissement personnel. C’est donc par amour, que je l’ai laissée partir ces derniers mois.

    Islande, pays de l’Est de l’Europe…, elle est enchantée par cette vie de nomade. À chaque fois, nos retrouvailles se sont révélées chaleureuses et cela n’a fait que renforcer notre relation et notre amour.

    Ces derniers jours, elle est revenue d’un long voyage au Pérou (2 mois) et elle vit mal cette fois-ci son retour à la réalité. Je me dis qu’elle traverse « la déprime d’après voyage ». Et je comprends tout à fait la rupture entre un monde inconnu, rempli d’émotions intenses, d’expérience et un monde connu rempli de normes, habitudes, horaires…
    Mais ce mal-être débouche sur une remise en question totale de ses orientations de vie : elle n’est plus sûre de continuer son travail et elle m’a avoué qu’elle envisageait même mettre un terme à notre relation.

    Pourtant, les sentiments sont encore là. Elle m’a dit avec sincérité qu’elle éprouvait de l’amour et qu’elle n’avait jamais vécu une histoire aussi belle que la nôtre dans sa vie.

    Elle est perdue… Tirailler entre son besoin extrême de liberté, d’indépendance et l’attachement profond qu’elle a noué avec moi.

    C’est une situation très déstabilisante…

    D’autant plus que je lui ai toujours laissé énormément de liberté et que je ne suis pas du tout possessif ou jaloux. De plus, nous avons énormément de projets en commun (voyages ensemble, concerts, sports en commun…)

    Nous partons régulièrement en van. Nous nous sommes aménagés un van et nous partons souvent à l’aventure ensemble. Ce que je suis en train de dire c’est que nous avons une relation saine, dynamique et remplie de légèreté.

    C’est pour cela que je ne comprends pas son attitude…

    Peut-être qu’un avis extérieur m’aiderait à comprendre…

    Je suis un peu perdu…

    1. Je suis désolée de lire ça. Je ne sais pas si ma réponse pourra vraiment t’aider.

      Parfois, quand on rentre d’un long voyage, on ressent une « déprime » comme tu dis, un décalage entre la personne que l’on est devenue et nos amis restés sur place. On peut avoir l’impression d’avoir évolué plus vite ou sur un autre chemin, on peut avoir cette sensation que celles et ceux qu’on aime ne voient pas nos changements, qu’ils ont gardé l’image de celle qu’on était « avant ». Ce décalage peut conduire à un sentiment d’incompréhension. On est là, on a changé, on voit les choses sous un nouveau jour et on se demande pourquoi nos amis sont restés figés (alors qu’ils ont peut-être avancé mais on ne le voit pas forcément). On se demande si ce retour a un sens, si on a vraiment envie de retrouver la vie qu’on avait avant. Ca ne veut pas forcément dire qu’on n’était pas heureuse avant le départ ou qu’on n’aime plus nos proches. Cela veut simplement dire que des tonnes de questionnements et de doutes se bousculent dans notre tête (et dans notre cœur).

      Comme tu le dis, elle a l’air tiraillé. Parler des bouleversements du retour n’est pas toujours évident : il y a la peur de s’entendre dire qu’on fait un caprice, la peur d’être incomprise dans nos sentiments, la peur de décevoir aussi.

      Je ne peux parler qu’à partir de ma propre expérience. Plusieurs fois, j’ai vécu des retours compliqués. En amour et en amitié, j’ai pu avoir des mots surs à dire et encore plus à entendre. Ce qui m’a permis de ne pas perdre les gens que j’aime, c’est leur bienveillance. Je savais que notre relation ne pouvait pas reprendre là où on l’avait laissé, que mes voyages n’étaient pas des parenthèses qu’on peut ignorer mais la continuité de ma vie. Alors, plutôt que de faire comme si rien n’avait changé, on a construit de nouvelles relations. Autant mes amoureux que mes amis ont eu beaucoup de patience envers moi. Même s’ils ne comprenaient pas mes interrogations ou certains comportements, ils étaient là pour moi.

      Tout le monde fonctionne différemment mais, peut-être que le fait de ne pas se sentir pressée ou brusquée peut aider. Sentir qu’on a le temps d’atterrir, de répondre à nos propres questions et trouver notre rythme. Sentir que celles et ceux qu’on aime ne nous mettent pas la pression, qu’ils attendent juste de nous qu’on soit heureuse. Sentir que si qu’on nous aime encore, malgré les changements.

      Je n’ai donc pas vraiment de conseil à donner si ce n’est celui de prendre le temps, de voir ensemble vers où vous voulez aller.

      J’espère de tout cœur que vous réussirez à vous comprendre.

  21. D’actualité, à n’importe quel moment de n’importe quel voyage, pour toustes celleux qui comprennent un peu, beaucoup ou pas du tout notre bougeotte…
    Des mots extrêmement poétiques aussi..
    Très bons chemins à toi et belle aventure suédoise, puisque c’est là que tu pars au moment où je découvre ces mots pour la première fois.
    Jul’

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